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Explications et observations sur la notation souveraine de l’Etat tunisien par l’agence de notation tunisienne PBR Rating
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Explications et observations sur la notation souveraine de l’Etat tunisien par l’agence de notation tunisienne PBR Rating

Durant la dernière décennie, la notation souveraine de la Tunisie s’est vue dégradée à plusieurs reprises par les agences internationales de notation. Retour sur la signification du processus de notation souveraine et ses impacts sur la Tunisie, avec PBR Rating, l’agence de notation tunisienne.

  • Définition de la notation financière

La notation financière est l’expression de la qualité financière d’une entité économique ou d’un produit financier. Il s’agit d’une opération d’évaluation approfondie opérée par des institutions spécialisées (dénommées « agences de notation »), basée sur une approche séquentielle entre une phase de diagnostic intrinsèque, une analyse environnementale et une évaluation des leviers de support.

La notation financière constitue, pour les investisseurs et les opérateurs économiques, un critère clé dans l’estimation du risque financier qu’un investissement ou qu’une relation économique comporte, particulièrement dans le cadre d’un contexte financier de plus en plus global qui rend difficile la maîtrise de l’information et, donc, de tous les paramètres de risque d’une opération économique ou financière.

Ainsi, les entreprises, les Etats, les collectivités et les grandes structures économiques ayant d’importants besoins de financement et de prometteuses perspectives de développement, voient dans les missions de notation financière un levier de renforcement interne en matière de gouvernance et de gestion financière, mais également un support de valorisation auprès du système financier ou de potentiels partenaires économiques.

  • Notation locale et notation internationale : distinction et complémentarité

Dans ce cadre, les missions de notation financière se déclinent selon le besoin et la typologie de chaque entité notée. Il est important de rappeler qu’il existe deux grilles de lecture de la notation financière, à travers la notation locale (à monnaie locale) et la notation Internationale (à monnaie étrangère).

La notation locale permet de présenter le profil de risque d’une entité donnée dans son environnement économique et financier local. Elle se distingue en termes de présentation, avec la présence de 3 lettres entre parenthèses après la note, permettant d’identifier l’environnement national dans lequel cette note a été attribuée, par exemple : BBB(TUN), AA(TUN), …

Par contre, la notation internationale prend en compte, en plus des risques et des paramètres intégrés dans le cadre d’une notation locale, le risque financier du pays et des transactions financières émanant de ce dernier.

En matière de notation, il existe un certain consensus sur le plafonnement de la note internationale d’une entité donnée par rapport à la note internationale de son pays (sauf existence de certains facteurs justificatifs d’une grande décorrélation entre le risque de l’entité notée et son environnement national). De ce fait, une dégradation de la note du pays peut entraîner directement une dégradation des notes des entités du pays en question.

  • Suivi de la notation souveraine tunisienne

La notation souveraine est une notation attribuée à un Etat afin d’identifier la qualité de sa situation financière et ses capacités en matière de solvabilité et de performances budgétaires. De fait, les Etats sont des opérateurs économiques qui expriment des besoins de financement externes – notamment sur les marchés financiers – et qui sollicitent donc des notations (souvent, plusieurs notations issues de différentes agences de notation) afin d’assurer leurs processus de collecte de ressources.

Dans une perspective générale, agrégeant les méthodologies des agences de notation, la note souveraine se base essentiellement sur (1) la croissance économique, (2) les potentialités de création de valeur sur le territoire national et autres agrégats macroéconomiques d’importance stratégique, (3) la gouvernance et les institutions étatiques, (4) la situation des finances publiques et les capacités de mobilisations des ressources et (5) la résilience face aux risques (politiques, financiers, opérationnels, etc…).

Chaque axe précédemment cité se décompose en plusieurs thématiques d’analyse, le tout étant ajusté par d’autres paramètres d’évaluation, à l’instar des couvertures et des garanties externes.

Il est à rappeler que les procédures de notation se font à travers les observations opérées directement par les agences de notation (sur certains aspects économiques et financiers au sein du pays noté) et à travers des échanges de données avec les autorités financières du pays noté.

Sur la base d’une notation agrégée à partir des notes des agences internationales de notation, la note moyenne de la Tunisie est passée de BBB, à CCC, sur la dernière décennie (soit 9 translations défavorables sur la grille de notation).

L’évolution de la note tunisienne peut s’expliquer par plusieurs facteurs, dont les plus prépondérants dans le schéma de notation sont : les indicateurs budgétaires (6,2%* de déficit budgétaire, par rapport à 5,5% pour la LF2023), la croissance économique (1,9%* en glissement annuel, par rapport à une croissance estimée de 2,6% en 2022), le commerce extérieur (-29,8MD* de déficit commercial, par rapport à 25,2MD en 2022), l’inflation (11,1%* en moyenne annuelle, par rapport à une moyenne de 8,3% en 2022), l’épargne (3,6% d’épargne nationale*), l’investissement (10,9% de taux d’investissement*), le déficit des entreprises publiques…

Par ailleurs, la note souveraine de la Tunisie a été également impactée par les perceptions extérieures concernant la situation politique et l’instabilité de la gouvernance durant la dernière décennie. Dans ce cadre, il est important de rappeler le contexte national et international de la notation tunisienne sur la période 2010-2022. En effet, la Tunisie a entamé, depuis 2010, un changement politique majeur et historique ponctué par le passage à la 2ème puis à la 3ème République (en 2014, puis en 2022) et marqué par de nombreuses crises internes et externes (attaques terroristes, épidémie du Covid-19, guerre en Ukraine, …). Une période durant laquelle la gestion des revendications sociales et des aspirations politiques a pris grandement le pas sur le pilotage des équilibres économiques.

  • Impacts de la dégradation et facteurs de rétablissement de la notation souveraine

Les impacts de la dégradation de la notation souveraine de la Tunisie sont perceptibles sur trois principaux aspects :

  • La gestion budgétaire : l’évolution négative de la notation souveraine entraîne un enchérissement du coût de l’endettement international, jusqu’au tarissement de ses sources, en cas de risque substantiel sur la solvabilité du pays émetteur. Un déséquilibre de collecte des ressources, vers une sollicitation extrême des liquidités et des opérateurs locaux, est susceptible de transmettre les difficultés de financement de l’Etat central, au financement local de l’ensemble de l’économie.
  • La sphère financière : La notation souveraine a un impact direct sur les établissements financiers du pays noté. La dégradation de la notation souveraine impact défavorablement le coût de financement et la qualité des actifs détenus par les établissements financiers locaux. Par ailleurs et en cas de dégradation extrême de la notation souveraine, c’est le principe d’intermédiation et de correspondance avec d’autres établissements financiers dans d’autres pays qui peut être compromis.
  • La sphère économique : Au-delà des effets indirects de la dégradation (suite aux impacts de la notation souveraine sur la gestion budgétaire et sur la sphère financière), le tissu économique supporte une détérioration de sa qualité en tant que partenaire commercial auprès des opérateurs internationaux. En effet, l’évolution du risque pays engendre une défiance sur la solvabilité des entreprises locales, impactant les conditions d’approvisionnement (rareté et cherté de certains produits), les modalités de transaction (délais de paiement), les primes

d’assurances internationales, les investissements (notamment étrangers), … ce qui a un impact direct sur la création de valeur nationale ainsi que sur la situation financière des acteurs locaux.

La restauration progressive de la notation souveraine tunisienne est conditionnée par le renforcement de la confiance dans la Tunisie, en tant que partenaire économique et financier, à l’échelle locale et internationale. Il s’agit de mettre en place un plan d’action, dont les bases sont de Rassurer, Planifier et Exécuter.

Tout d’abord et afin de remédier rapidement aux dernières dégradations de la note, il est important de clarifier et de communiquer sur un plan de financement détaillé de l’exercice budgétaire actuel, mettant en exergue l’absence de risque quant aux décaissements des dépenses du budget 2023 et notamment celles du remboursement de toutes les échéances des dettes extérieures du S2-2023. La signature définitive et le démarrage de l’exécution de l’accord avec le FMI (1.9 MD $) reste un point central dans le dispositif de financement de l’Etat tunisien, tel qu’annoncé par les autorités financières.

Ensuite, les opérateurs économiques et financiers, locaux et internationaux, sont en attente des orientations tunisiennes pour la gestion du déficit public ainsi que les déficits des entreprises publiques. Dans ce cadre, il est important de souligner que les mesures de gestion des finances publiques se doivent d’être accompagnées par des réformes structurelles au profit de l’économie tunisienne afin que ces mesures ne se transforment pas en de simples leviers d’austérité inflationnistes. Toute mesure inflationniste se doit d’être opérée dans un contexte de création de valeur soutenue afin d’en maîtriser les impacts sur la société tunisienne et ses opérateurs économiques.

Par la suite, les réformes structurelles se doivent d’être axées prioritairement sur la valorisation et le renforcement des capacités productives du tissu économique tunisien à travers les leviers de l’exportation (gestion de la balance commerciale) et l’investissement (et notamment étranger).

La dégradation de la notation souveraine tunisienne est le reflet de déséquilibres macroéconomiques internes, de mutations politiques et d’un contexte international très défavorable. Il s’agit de la perception de la Tunisie par ses potentiels partenaires à travers une notation qui a des impacts directs sur la situation des finances publiques, des opérateurs privés et des citoyens. Le rétablissement et le relèvement de la notation est un processus possible et réalisable à travers des actions concrètes, dont les premières peuvent être menées à court terme afin de réaliser et d’exécuter le potentiel que recèle le tissu économique national.

A propos de PBR Rating :

L’agence de notation financière PBR Rating, initiée et parrainée par le Conseil Bancaire et Financier (anciennement appelé Association Professionnelle Tunisienne des Banques et des Etablissements Financiers), a été inaugurée en mai 2018 par le ministre des Finances. L’agence a pour vocation le déploiement et la diffusion de solutions de notations financières et extra-financières, ainsi que la publication d’études et de recherches économiques, contribuant à la transparence et à l’efficience de l’information financière, pour l’ensemble des intervenants économiques, nationaux ou internationaux, sur le marché tunisien.

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