Les besoins de financement extérieur de la Tunisie restent en grande partie tributaires de la conclusion d’un accord avec le Fonds monétaire international (FMI), du “respect de l’Etat de droit” et de la mise en œuvre de réformes structurelles, a souligné la Direction Générale du Trésor, relevant du ministère français de l’Economie, des Finances et de la Relance.
Dans une note publiée fin mars 2022, la Direction générale du trésor français indique que la Tunisie fait face à de très grandes difficultés pour emprunter et financer ses besoins, en l’absence d’un programme avec le FMI et compte tenu des craintes croissantes sur la soutenabilité de sa dette.
« Le recours massif aux emprunts extérieurs prévu en 2022, à hauteur de 12,7 milliards de dinars, afin de couvrir près des deux tiers des besoins de financements annuels rend » impérative » la conclusion d’un programme avec le FMI.
La crise russo-ukrainienne devrait également, estime le trésor français, exacerber les besoins de financement au-delà des 20 milliards de dinars prévus dans la LFI 2022 pour soutenir le système de prix subventionnés de produits de base.
S’agissant de la dette publique, il souligne que la trajectoire d’endettement reste « insoutenable » sans réformes. En effet, la dette publique est passée de 74,2% du PIB en 2019 à 89,7% en 2020 et devrait atteindre 90,2% en 2021, selon le FMI.
Elle ne comprend pas l’endettement des entreprises publiques, qui atteindrait en sus 40% du PIB, dont plus de 15% du PIB serait garanti par l’Etat.
Après une récession historique, le rythme de reprise actuel ne permettrait pas un retour au niveau d’activité d’avant crise avant 2024. Les taux d’investissement et d’épargne bruts déjà jugés insuffisants, se sont effondrés respectivement à 7,8% du PIB et 4% du PIB en 2020.
Dès lors, l’instabilité politique et les besoins de financements élevés de la Tunisie obèrent les perspectives économiques : les dernières projections de croissance 2022 s’établissent entre 3,3% (FMI) et 3,5% (BM).
La DG du trésor français pointe les pressions inflationnistes qui refont surface, tandis que la dégradation de la situation sociale et de l’emploi (le taux de chômage atteint 18,4% de la population active, le plus haut taux de chômage observé depuis 2011, avec un taux de plus de 42% chez les jeunes), entretient les tensions.
« L’actuelle résilience du secteur bancaire paraît rassurante, mais l’incertitude reste de mise sur l’ampleur du choc à venir et la capacité du secteur à y faire face. La situation reste cependant incertaine. L’inquiétude concerne l’expiration des reports d’échéance de crédit et l’exposition des banques au risque souverain et aux entreprises publiques, dont les difficultés de trésorerie s’accroissent et dont l’encours de crédits atteint 17% du PIB« .
« Si le déficit courant s’est récemment réduit, les inquiétudes persistent sur les capacités de la Tunisie à le financer. Le déficit courant devrait de nouveau se creuser cette année pour atteindre 7 à 7,5% du PIB, aggravé par les conséquences de la crise sanitaire sur les échanges (perturbation sur l’appareil exportateur, pénuries et renchérissement des importations). Les risques pour les équilibres externes restent élevés« .
« Le déficit budgétaire devrait se maintenir à 6,7% en 2022 selon la LF 2022. La masse salariale a explosé à un rythme annuel moyen de près de +12% entre 2010 et 2020. La dégradation de la situation des entreprises publiques, fait également peser des risques de plus en plus inquiétants sur les finances publiques. Les transferts aux entreprises publiques seraient passés de 7,5% du PIB en 2019 à 8,9% en 2020, principalement dans les transports, l’énergie et l’agroalimentaire auxquels sont fixés des objectifs sociaux« .