Les contrats à terme d’électricité ont fortement chuté en France au cours des derniers mois et menacent de tomber en dessous du coût d’exploitation du parc nucléaire géré par EDF, mettant à mal la rentabilité de l’électricien public, déjà fortement endetté.
Le prix de base pour 2026, première année d’entrée en vigueur d’un nouvel accord entre EDF et l’Etat français, a chuté de quelque 30 euros en trois mois et se négocie actuellement autour de 71 euros/MWh, juste au-dessus du prix de référence de l’électricité nucléaire autour de 70 euros établi dans le pacte conclu en novembre.
Les coûts opérationnels d’EDF ont été calculés par la Commission de régulation de l’énergie (CRE) à environ 60 euros par MWh, ce qui signifie qu’EDF pourrait produire de l’électricité à perte si ses contrats ne sont pas couverts correctement.
« Si les prix continuent de chuter, la capacité d’EDF à financer des investissements majeurs pourrait être remise en question« , prévient Clément Bouilloux, analyste chez EnAppSys.
EDF n’a pas répondu à une demande de commentaire.
Selon les analystes, la baisse des prix s’explique par la faiblesse de la demande, l’augmentation de l’offre d’énergie renouvelable et la chute continue des coûts du gaz en Europe.
« Personne ne va se précipiter pour acheter des contrats 3-5 ans à 90 euros qui sont plus chers que le marché, donc il y a un début d’inquiétude à avoir, car ça veut dire qu’EDF va être obligé de vendre en spot, ou alors à des prix inférieurs à ce qu’ils prévoyaient« , souligne une source industrielle.
« Le gouvernement a fait le pari que les prix n’allaient pas baisser dans les prochaines années. Si les prix baissent de manière significative, EDF va être dans une situation très embêtante puisqu’ils n’ont pas négocié de plancher« , ajoute-t-elle.
« A ce moment-là, comment EDF se finance ? Je pense que, là, la situation sera compliquée« .
Les coûts d’EDF ont fortement augmenté en 2022, pendant la crise énergétique européenne, après qu’une grande partie du parc nucléaire a été mis hors service en raison de problèmes de corrosion, obligeant l’entreprise à racheter à des prix record l’électricité qu’elle avait précédemment vendue.
« Si cette baisse est temporaire, l’impact sera faible. Mais rappelez-vous de la période 2015-2018 : durant ces années, la situation a été financièrement très compliquée pour EDF« , souligne Nicolas Goldberg, directeur associé chez Colombus Consulting.
Les prix français ont chuté à environ 27 euros/MWh entre 2015 et 2018 et le groupe a dû vendre de l’électricité à perte, ce qui a plombé ses résultats.
Source : Reuters